samedi 29 août 2009

Dimanche 9 août 2009 : The Boulevard of broken dreams

Drame matinal : à cause de la différence de voltage, ici, mon épilateur électrique marche difficilement. Il émet un râlement d’épilateur à l’agonie. Ca me fend le cœur, et c’est la panique. Comment vais-je tenir vingt jours? J’ai l’impression de devoir passer une épreuve de survie en territoire hostile. C’est normal que les Françaises aient la réputation de ne pas s’épiler ici si on ne nous en donne pas les moyens, aussi.

Après m’être remise de cet évènement fort contraignant, je démarre ma première journée en solitaire. Aujourd’hui, Vanick et Laurice travaillent tout les deux. Et il me semble confusément qu’il faut que je réapprenne à être seule après ces derniers mois un peu fous- physiquement seule en tout cas pour l’être moins quand je suis censée être entourée. Ce voyage aux Etats Unis est plus important pour moi qu’il n’en a l’air. Comme un déracinement volontaire le plus loin possible pour prendre un peu de recul et arrêter cette course en continu un peu ridicule. J’ai une étape à franchir.








Fillmore Street et ses cafés très bobos ; le Japan Center et son festival qui sent le graillon, ses danses hawaïennes, et ses concerts de J-rock ; la cathédrale Ste Mary of the Assumption et sa forme de machine à laver. Je débarque au milieu de la messe dans ce gigantesque monument blanc dont l’architecture très peu conventionnelle a été beaucoup critiquée. Je ne suis pas allée à l’église depuis plus de dix ans, sauf pour des mariages, des enterrements ou des baptêmes. Il m’est arrivé ces dernières années d’avoir très envie d’y retourner ; j’ai même voulu me confesser au Vatican mais mes copines m’en ont empêché. A la place, je suis allée voir un psy.

Assise sur un banc en attendant que la cérémonie finisse, je me sens très petite, un peu intruse, et je ne trouve absolument pas le calme, la sérénité, la paix intérieure que tout ça est censé m’inspirer. Mais je perçois la nécessité de réussir à me ménager, pour moi, des temps suspendus. Je ne sais plus exactement quand ces moments-là sont devenus insupportables.




Je ressors de la cathédrale des bonnes résolutions plein la tête, sur l’aménagement de mon emploi du temps et la manière de me traiter. Et comme à chaque fois que je prends ce genre de décision, j’ai passablement envie de vomir et de faire tout l’inverse, encore plus de bêtises. Bon. Le pèlerinage vient de commencer mais il va être long…


Lower Haight, le prolongement du fameux quartier hippie de Haight Ashbury, qui n’a pas encore été contaminé par l’attraction touristique. Cette partie-là est finalement beaucoup plus saine, plus « authentique ». Il n’y a pas de vieux junkies à tout les coins de rue, pas d’exploitation ultra mercantile d’un passé qui rêvait du contraire. Tout est beaucoup plus calme, ici. Quelques tours dans les fripes du coin, et déjeuner au Café International. Les fallafels sont bons et le café glacé réserve une surprise…





Stern Grove, et son festival de world music dans les hauts pins, avec une chanteuse colombienne qui doit être proche des soixante-dix ans, mais pleine d’un dynamisme et d’une chaleur magnifiques. Des gens s’entassent par centaine sur les collines très pentues du parc, qui forment une espèce d’amphithéâtre naturel. Je danse les yeux fermés dans la foule compacte pour ne pas me sentir mal. Je ressens les couleurs ; c’est une sensation étrange, mais là, entre trois pas de salsa, je sens vraiment du rouge et du jaune traverser mes paupières.

Ma solitude commence à me peser. Ca ne fait pourtant que quelques heures. En sortant du parc, un jeune homme me propose de me ramener dans le centre ville en voiture. Je décline l’invitation et passerai le reste de la journée à m’en vouloir. Je reviens sur mes pas dix minutes plus tard pour voir s’il est encore là. Si j’avais dit oui, tout serait peut-être différent. Et si c’était ça le bouleversement que j’attendais? Le petit « truc » qui allait inverser la vapeur?

Je grimpe la côte jusqu’au tram et j’ai envie de pleurer, de hurler, et je sens bien que cette réaction n’est absolument pas normale. Que c’est exactement de ça dont il faut que je me débarrasse. Déposer les armes et avancer sereinement au lieu de vivre les choses comme un combat perpétuel. A nouveau, je me demande comment on fait, comment ça marche, comment on est censé faire.

J’écoute Melpo Mene dans le bus qui me ramène à Pacific Heights ; je me souviens de ce jeune homme seul en scène. La crise est passée, ça va mieux. Maintenant, ça va aller mieux. Maintenant, ça va aller.

Décidément, c’est une journée à thème.

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